(ou le souvenir permanent de Byzance)

Le secret des premiers capétiens par Marie-Madeleine Martin. Page 125.

Au commencement était la route,, jalonnée de sanctuaires. Avant la chanson de Geste, la légende : légende locale, légende d’église. »

Joseph Bédier

J’avais découvert que plusieurs érudits du 17e siècle se mettaient d’accord sur l’existence d’un Robert de Saxeau parmi les premiers Robertiens. Ayant à peu près terminé les corrections géographiques concernant la région du Centre, pour la période des origines, j’en reviens à mes investigations purement historiques ; et décidai d’interroger longuement les documents concernant ce personnage, qui m’amènerait peut-être sur une piste utile.

Mais c’est par l’histoire d’un ermite que nous connaissons l’existence du prince Robert, et il convient donc de rendre à cet ermite le premier hommage. Sa biographie est plus romanesque et bouleversée qu’une légende ; mais elle est l’Histoire.

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Jacques, que l’hagiographie appellera « de Saxeau », naquit dans l’empire de Byzance, d’Istanbul d’aujourd’hui, au IXe siècle. Or, Byzance a tenu un rôle si grand dans la vie des Gaules, du IVe au XIe siècle, qu’il nous faut bien rappeler un peu de sa gloire.

Fondée par l’empereur Constantin (d’où le nom populaire de Constantinopolis, la ville de Constantin) au IVe siècle, elle devait être, dans l’esprit de son fondateur, la seconde Rome, Néa Romè. Mais cette cité avait déjà connu un embryon d’existence plusieurs siècles auparavant : c’étaient des Doriens qui avaient créé Byzontion sur le dernier promontoire de l’Europe. ce qui nous ramène à nos Pélasges ! Et derrière l’horizon des premières montagnes d’Asie, aperçues de Byzantion se trouvait le site de la ville de Troie.

Carrefour de routes terrestres et maritimes, Byzance était, comme Rome, bâtie sur sept collines ; et l’empereur Constantin y fit édifier l’un des palais les plus grandioses du monde, disparu aujourd’hui. La superficie de ce palais couvrait 40 hectares : des églises somptueuses, éblouissantes de marbre et d’or, s’élevaient en grand nombre à l’intérieur. Elles symbolisaient la victoire du christianisme, auquel Constantin avait donné droit de cité dans tout l’empire. Et, l’empereur pensait ainsi que Byzance serait vraiment un nouvelle Rome : celle du Christ.

Fragilité des calculs humains !

Constantinople, créée pour être la ville de la latinité en Orient deviendra une ville grecque, la ville de la civilisation hellénique… et c’est Rome, la ville de l’apôtre Pierre, qui restera la capitale du monde religieux.

A Constantinople pourtant, le latin, la langue latine, avait triomphé pendant deux siècles : il demeurait la langue de la cour et de l’administration : il restait la langue de l’armée. St Jean Chrysostome dit, au Ve siècle, qu’il est impossible de faire son chemin à Byzance si l’on ne sait pas le latin ; les soldats, même en Syrie, parlent latin et c’est en latin que les légions romaines tracèrent les inscriptions ne Egypte, sur la statue de Memnon. En plein coeur du Ve siècle, l’empereur Théodose, qui n’a jamais vécu ailleurs qu’à Constantinople, prend l’initiative d’un code de législation impériale entièrement rédigé en latin. L’empereur qui voulut refaire l’empire de Rome à partir de Byzance, Justinien, publiera naturellement son Code et les Pandesctes en latin, et même les titres et les commentaires de ces compilations ne seront pas rédigés en grec, mais en latin. Le populations grecques se donnent à elles-mêmes le titre de « Romains ».

Et cela provient d’un idée religieuse : être Hellène c’est être païen dans l’esprit de tous ; et être romain, c’est appartenir à l’orthodoxie. Cette notion demeurera vivante jusqu’au VIIe siècle et laissera des traces qui expliquent le déroulement de certains faits médiévaux, et l’accueil fait aux Croisés, à partir du XIe siècle en Orient.

Mais cette romanité byzantine, si religieuse, si fervente avait hérité du mauvais génie grec de la discussion à outrance, si bien que les hérésies déchirèrent très vite l’Etat nouveau, formé sur les assises de la foi.

Au VIIe siècle, au IXe siècle les troubles religieux vont dégénérer en révolutions politiques. C’est l’époque de Jacques de Saxeau.

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Rédigé par

Sam Burette

Histoire, Régionalisme, bibliophile