Devant cette situation économique qu’il connaissait bien, Colbert pouvait imaginer en choisissant Bourges que l’implantation d’une manufacture procurant du travail à la population serait bienvenue et qu’elle pourrait prospérer.
L’affaire semblait réglée à la fin du mois de juillet 1666 le maire et les échevins ayant répondu rapidement. Ils n’avaient peut-être d’ailleurs pas d’autre solution, car satisfaire une proposition du ministre tout puissant de la part du roi était un gage non négligeable pour l’avenir comme le laisse clairement entendre l’intermédiaire M. Meynard le 3 septembre 1666 :

"vous ne souriez rien faire de plus agréable au roi et à toute la cour qui assurément donnera lieu à sa Majesté de reconnoitre vostre zèle en d'autres occasions profitable à votre ville".

Des courriers s’échangèrent et Madame Catherine de Marcq une des directrices de la Compagnies écrivait88 en 1666 :

Volant en Point de France © Maison des Dentelles, Argentan
"Messieurs, nous recevons avec joye la lettre que vous nous faites honneur de nous écrire. L'affection que vous tesmoignez a favoriser lestablissement de la Manufacture Royale de Point de France à Bourges nous y fait espérer un heureux succès…".

Le 24 août 1666, M. Meynard écrivit aux échevins que les directeurs parisiens

"firent partir samedi dernier cinq maîtresses pour aller passer à Auxerre et en prendre trois qui font le nombre de quatorze si vous fournissez 300 filles…".

Le roi, la cour et Colbert étaient instruits de l’implantation de la manufacture à Bourges et M. Meynard écrivait à nouveau :

"Il faut s'il-vous-plaist dès le commencement pousser l'affaire au poinct qu'elle réussisse et que le roy, Monseigneur Colbert aient la satisfaction que l'on espère et que la cour est pleinement instruite de cet establissement… il faut avoir dans chaque cartier des personnes qui excitent vos jeunes filles de toutes conditions… Et madame Raffy lui pria d'expédier des lettres de cachet pour vous Messieurs, et autres corps de la ville, Monsieur l'Intendant et mesme pour Monseigneur l'Archevesque afin d'insinuer dans tous les couvents aux filles religieuses de Bourges pour les obliger à apprendre à faire des ouvrages de fil qui leur seroy un avantage puisque leurs ouvrages leur seroient payés".

Il était question dans le même courrier que les ouvrières travaillent « à l’assemblage des ouvrages venant d’Aurillac qui au lieu de les envoyer à Alençon, le Havre, Reims, Sedan et autres lieux, on les rendrait en leur perfection à Bourges par le moyen de bonnes ouvrières ». Ce qui signifie qu’à Bourges, il s’agissait d’une manufacture uniquement consacrée à l’exécution des phases les plus délicates puisque un apprentissage pour le Venise, dentelle à concurrencer demandait plusieurs années. Il fallait former des femmes et des jeunes filles à un travail restreint en quelques mois.

Aucun document ne permet de savoir exactement en quoi consistait cet assemblage du Point de France. Une précision nous est parvenue concernant les conditions de travail des ouvrières dans un courrier89 du 30 juillet 1666 que le directeur général des manufactures Monsieur Pluymers écrivait aux échevins, indiquant que les ouvrières entre 10 et 20 ans y seraient apprenties pendant six mois et :

"après quoi elles travaillerons chacune chez soy et on les payera selon perfection de leurs ouvrage ce qui bannira l'oisiveté de leur ville et y apportera l'abondance."

Pour ne pas inquiéter les familles, le directeur acceptait immédiatement qu’après l’apprentissage les ouvrières travaillent chez elles, car c’était une idée très nouvelle que celle de sortir de chez soi, de son quartier pour aller travaille dans une manufacture.


88 Courrier sans date précise.
89 A.M. Bourges HH20.



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Rédigé par

Colette Guyon

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