Centre départemental de documentation pédagogique
Bourges
Documents rassemblés et présentés par : Jean Rojat
Professeur d’Ecole Normale, Responsable du Service éducatif des Archives du Cher, Animateur de la Commission Histoire – Géographie du C.D.D.P. de Bourges.
« Le développement de l’esprit d’observation et celui de l’esprit critique mesurent la réussite (de l’enseignement de l’Histoire) : l’élève qui passablement suivi cet enseignement se reconnaît à ce qu’il sait lire un journal, un programme électoral, un communiqué officiel plutôt qu’à la somme de faits et dates qu’il peut citer »…
Marcel Rheinard
L’Enseignement de l’Histoire p. 139, P.U.F., 1967
Documents provenant de :
Archives départementales du Cher :
Documents n°s 1-2-3 bis-5-6-7-8-11-12-13-14-15-16-17-18-19-20-21-22-23-24-25-26-30-33
Archives particulières :
Documents n°s 3-4-10-31-32
Archives photographiques du « Berry Républicain » :
Document n°9 « Histoire du Maquis de Souesmes » par J. Rafesthain – Documents n°s 27-28-29
Ce dossier n’a pu être réalisé que grâce à l’obligeant concours :
de l’imprimerie du C.R.D.P. d’Orléans : M. Julien
de l’imprimerie du C.D.D.P. de Bourges : M. Fuscien
des presses de l’imprimerie Desquand à Bourges
des services techniques de la Préfecture du Cher : M. Bonnefou
des services techniques de la Maison de la Culture : M. Pattitucci, M. Millet, M. Monnereau.
Maquette de la pochette : F. Le Loch’
Que tous soient remerciés.
Production du C.D.D.P. de Bourges
9, rue Branly – Tél. 24-54-91
Dépôt légal : 4ème trimestre 1974
Le Directeur de la publication : J.F. Goussard
Débâcle et invasion
Documents 5, 6, 7
Le 19 juin 1940, Bourges est déclarée « ville ouverte ». Les dernières troupes de la 6ème armée, 17ème Corps d’Armée en retraite depuis la bataille livrée sur l’Aisne du 5 au 12 juin, ont dû abandonner la ligne défensive de la Loire après de durs combats à Gien, 17 juin.
Dans la nuit du 19 au 20 juin, repli général sur l’Indre et la Creuse. Un vide est créé entre les éléments de cette armée en repli vers le Sud-Ouest et les troupes qui combattent dans le couloir rhodanien et les Alpes. Le gouvernement du Maréchal Pétain installé le 16 juin a demandé les conditions d’armistice le 17.
Aux troupes en repli s’ajoute l’exode des populations civiles en colonnes confuses qui servent de cibles à l’aviation allemande.
Document n°5 : bombardement de la Chapelle-d’Angillon – 18 juin 1940 – La veille, la commune avait servi de quartier général à l’Etat-Major du 17ème Corps d’Armée.
Document n°6 : Les troupes et l’administration militaire allemandes (Komandanteur) s’installent des les territoires occupés. Affiche apposée à Vierzon, édictant le couvre-feu (2ème paragraphe) et prenant des dispositions de sécurité (1er paragraphe – la circulation à sens unique sur chaque trottoir en facilite le contrôle, la mesure sera généralisée en 41-42 avec la croissance des attentats contre l’occupant).
Les chants mentionnés au 1er paragraphe sont : Deutschland Uber Alles : l’hymne national allemand ; Horst Wessel Lied, l’hymne du Parti Nazi, érigé en second Hymne national : chant composé par Horst Wessel, membre du parti tombé dans une échauffourée (1930) et idéalisé par la propagande de Goebbels.
On trouvera là un exemple de ces attitudes théâtrales – caractéristiques du régime – dont l’occupant usa pour impressionner et se concilier à la fois l’occupé : défilés, concerts sur les places publiques…
Document n°5 – Rapport sur le bombardement de la Chapelle-d’Angillon
Adressé par le Maire à Monsieur le Préfet du Cher (extrait)
Un quartier général d’armée installé à la Mairie quitta le pays le lundi matin 17 juin vers 4h30. Dans la journée, il fut remplacé par un Colonel qui y établit son poste de commandement.
L’afflux des réfugiés a été particulièrement intense à partir du dimanche 16 juin : à la file interminable des voitures succéda un flot de piétons qui arrivait aussi dense, tant par la route nationale 140 (direction de Paris), que par la route nationale 728 (direction d’Auxerre).
L’hébergement des réfugiés fut assuré convenablement par les soins de la Mairie jusque vers le 12 juin, mais le nombre augmentant continuellement, il fallut dans les derniers jours se borner à assurer le ravitaillement en lait et en pain : le lait faut ramassé dans les fermes de la commune et la boulangerie fonctionnait jour et nuit. On peut évaluer à plusieurs dizaines de milliers le nombre des réfugiés qui passèrent la nuit du 17 au 18 juin sur le territoire de la commune : le camp militaire seul abritait plus de 3000 vieillards et enfants ; les fermes, les granges, les greniers, les bois et jusqu’aux fossés des routes servaient d’abris aux gens harassés.
Une permanence de jour et de nuit était établie déjà depuis plusieurs jours à la Mairie. Les réfugiés du camp reçurent l’ordre d’évacuer dans la nuit du 17 au 18 juin vers 2 heures du matin. La plus grande partie, fut emmenée par camions militaires. Dans la journée du 18 juin, l’évacuation des réfugiés fut assurée au maximum : l’ordre fut donné par l’autorité militaire aux réfugiés de continuer leur route, le stationnement prolongé dans le pays fut interdit, le Colonel lui-même arrêtait les convois militaires vides et y faisait monter les piétons.
Sur les conseils du Colonel qui jugeait un bombardement très possible, sinon probable, étant donné l’importance des deux grandes routes nationales qui s’y croisent, il fut recommandé aux habitants du pays dans la soirée du 18 juin vers 16 heures, de s’éloigner de l’agglomération et de se retirer dans la campagne. Le soir, le pays s’était progressivement décongestionné et on peut estimer qu’au moment du bombardement, n’étaient dans l’agglomération que les réfugiés surpris sur leur route ou ceux qui y faisaient une courte halte pour le ravitaillement et habitants attardés.
Le bombardement : le mardi 18 juin vers 19 heures une quarantaine de bombardiers arrivèrent en direction du nord, à une altitude de 2000 mètres environ. Ils dépassèrent légèrement le pays, le survolèrent en direction sud-ouest nord-est et lâchèrent aussitôt leurs bombes en trois tours, tout ceci accompagné de rafales de mitrailleuses.
Le bombardement dura 5 à 6 minutes environ et les avions repartirent en direction de la route 726 en bordure de laquelle ils lâchèrent le reste de leurs chargement à 3 km de la Chapelle-d’Angillon.
On peut évaluer à une centaine le nombre des projectiles tombés sur le pays, dont une cinquantaine de torpilles (voir le plan ci-joint pour la répartition). Le champ de foire et la rue du château furent particulièrement touchés. Des incendies se déclarèrent aussitôt au garage Turpin et sur le champ de foire où une douzaine de voitures furent carbonisées, quelques-unes avec leurs occupants. Le service d’incendie s’organisa rapidement et le feu fut maitrisé dans l’immeuble de Monsieur Turpin en quelques instants.
Les victimes : Les victimes étaient nombreuses sur le champ de foire, aux abords du lavoir (une quinzaine de morts), du pont sur la Sauldre (une trentaine de morts), de la maison de Monsieur Lacord sur la route nationale 140 (une trentaine de morts).
Un service de santé en repli arriva dans la commune quelques instants après le bombardement et porta les premiers secours aux blessés épars dans toutes les rues, secondé avec dévouement par ce qui restait des habitants. Pendant la nuit, tous les blessés furent ramassés et eurent un premier pansement. Ils furent installés sur des brancards et des lits de camp dans les les logements réquisitionnés par le Maire pout abriter les réfugiés, dans les salles de classes et dans quelques maisons particulières. Plus de 350 victimes tant militaires que civils furent ainsi soignés…